un tracteur de pulvérisation en train de traiter des vignes

Dérive aérienne en viticulture : enjeux et solutions

Comment limiter la dérive aérienne en viticulture ?

un tracteur de pulvérisation en train de traiter des vignes

Le plan Écophyto II+ fixe des objectifs ambitieux : réduire les usages des produits phytopharmaceutiques de 50 % d’ici 2025. Pour les acteurs du monde viticole, la maîtrise de la dérive aérienne lors de la pulvérisation des vignes est un véritable défi. Comment réduire la dérive sans altérer pour autant la protection des vignes ? Lors de l’édition 2021 du SITEVI, l’IFV et l’Inrae ont abordé cette thématique cruciale. Retour sur les points phares et sur les évolutions depuis cette date.

 

Lexique

La dérive aérienne de la pulvérisation représente la quantité de pesticide transportée en dehors de la zone traitée pendant l’opération, par les courants d’air. Cette dérive entraîne diverses conséquences : contamination des cours d’eau ou de zones sensibles, par exemple.

Le cadre réglementaire 

La réduction de la dérive aérienne étant un enjeu majeur de préservation de l’environnement, des cultures et des populations, un cadre réglementaire a été progressivement établi. 

L’arrêté du 4 mai 2017 pose les bases pour l’utilisation des produits phytopharmaceutiques, afin de protéger les points d’eau, les personnes vulnérables et les zones d’habitation. Notamment, cet arrêté prévoit :

  • Une ZNT (zone non traitée) à respecter autour des points d’eau, qui est fixée lors de l’autorisation de mise sur le marché (AMM) du produit en question.
  • Des distances de sécurité lors de l’utilisation des produits à proximité de zones d’habitation, de zones qui accueillent des travailleurs réguliers et des personnes vulnérables.

Les distances peuvent être diminuées sous réserve d’utiliser des matériels conçus pour diminuer la dérive lors de la pulvérisation. Ces derniers font l’objet d’une liste régulièrement mise à jour.

Comment mesurer la dérive lors de la pulvérisation ?

une jeune femme pulvérise manuellement les vignes

Il existe trois modes d’expression pour ladérive : sédimentaire, aérienne et exposition des riverains. Chacun d’entre eux doit faire l’objet d’une méthode spécifique de mesure.

  • Mesurer la dérive aérienne : elle se mesure à l’aide de collecteurs de gouttelettes, qui peuvent être placés sur des fils de nylon ou des perches télescopiques, à différentes distances de la zone traitée.
  • Dérive sédimentaire : l’utilisation de boîtes de Pétri à intervalles réguliers permet de mesurer la dérive sédimentaire après la pulvérisation.
  • L’exposition des riverains : quatre voies d’exposition sont retenues pour la mesure. Il s’agit de la dérive lors de l’application, des émissions de vapeurs après l’application, du contact avec une surface contaminée et du contact au sein des cultures traitées.

 

Le banc d’essai EoleDrift

Le projet EoleDrift a été mis en place pour mesurer la dérive de pulvérisation et mieux comparer les performances des matériels. L’objectif est ainsi d’identifier les équipements les plus efficaces et de valoriser ensuite les méthodes permettant de réduire la dérive.

Jusqu’à présent, le protocole à respecter pour mesurer la dérive dans des conditions de vents naturels était bien trop lourd à appliquer. EoleDrift est un mur de 5 mètres de long et de haut qui reproduit le vent. Utilisé conjointement avec EvaSprayViti, une vigne artificielle, ce banc d’essai rend possible la mesure de la dérive de pulvérisation dans des conditions de vent et de vignes dites « standards ».

 

Bon à savoir

Le dispositif EoleDrift a reçu la médaille d’argent aux trophées de l’innovation de l’édition 2017 du SITEVI.

Les facteurs de variation de la dérive aérienne 

De nombreux facteurs peuvent avoir une influence sur la dérive lors de la pulvérisation viticole. Ils concernant aussi bien les conditions environnementales, que les méthodes appliquées ou encore les caractéristiques de la vigne en elle-même. En voici quelques-uns :

  • Vitesse et direction du vent
  • Température et humidité
  • Stabilité de l’air
  • Densité du produit pulvérisé
  • Formule du produit
  • Taille des gouttelettes
  • Hauteur de la buse
  • Pression de pulvérisation
  • Topographie du vignoble
  • Densité des vignes
  • Orientation des rangées
  • Horaires de pulvérisation

Bon à savoir

Le dispositif EoleDrift a reçu la médaille d’argent aux trophées de l’innovation de l’édition 2017 du SITEVI.

Le projet TOPPS-Prowadis

Lancé en 2011 par l’ECPA (European Crop Protection Association), le projet TOPPS-Prowadis propose des bonnes pratiques à adopter pour limiter la dérive de pulvérisation :

  • Planifier les traitements en tenant compte des prévisions météorologiques (vent faible, températures moyennes, forte hygrométrie),Utiliser des buses qui génèrent peu de fines gouttelettes et privilégier une faible pression,
  • Favoriser des buses à injection d’air,
  • Tenir compte de la classification nationale des TRDP (Technologies de Réduction de la Dérive de Pulvérisation),
  •  Effectuer les bons réglages sur le pulvérisateur à chaque nouvelle application.

La nouvelle liste des équipements homologués 

Le 25 avril 2023, le ministère de l’Agriculture a fait paraître une nouvelle liste des équipements homologués pour réduire la dérive et donc, les ZNT. 12 nouveaux pulvérisateurs de viticulture sont venus étoffer la précédente liste datant de juin 2022, avec un coefficient d’efficacité pour réduire la dérive d’au moins 66 %.

L’utilisation de ces matériels permet aux viticulteurs de faire passer la largeur des ZNT autour des points d’eau de 50 ou 20 mètres à 5 mètres. Les zones à respecter pour protéger les riverains sont également réductibles.

 

Pour aller plus loin : la dérive aérienne en arboriculture

L’arboriculture doit, au même titre que la viticulture, relever le défi de la dérive aérienne. Plusieurs projets ont vu le jour.

  • Projet PulvArbo 2016-2020 : porté par le CTIFL et piloté par la DGAL, le projet vise à optimiser la pulvérisation en arboriculture fruitière. Il s’articule autour de 2 axes : identifier les matériels, les réglages et les pratiques les plus efficaces, dans un premier temps, puis adapter si possible les doses appliquées.
  • Projet CAPRIV 2021-2022 : débuté en octobre 2020, le projet CAPRIV fait un focus sur l’exposition des riverains aux pesticides. Il étudie aussi bien les solutions techniques (réglages, matériels, buses) que les barrières physiques naturelles mises en place, comme les haies.

 

Limiter la dérive aérienne lors de la pulvérisation fait partie des mesures agroenvironnementales nécessaires pour réduire les quantités de produits phytosanitaires utilisés. Pour réduire les risques environnementaux, les deux grands axes retenus sont d’utiliser des matériels plus efficients et de mettre en place en parallèle des mesures pour diminuer l’exposition à la dérive, via la définition de zones ou encore l’implantation de haies. La prochaine édition du SITEVI, prévue du 28 au 30 novembre 2023, devrait apporter un nouvel éclairage sur le sujet !